Pour
une nouvelle conception de la préparation physique
La conception traditionnelle de la préparation physique est basée
essentiellement sur l'endurance. Essayons de la résumer : on développe les
différentes filières aérobie, anaérobie lactique et anaérobie alactique. Le
travail aérobie constitue la base sur laquelle doivent reposer les 2 autres.
Parmi les moyens disponibles pour améliorer l'endurance, la course continue a
longtemps constitué la base essentielle, que l'on parle d'endurance fondamentale
avec un niveau de pulsation faible (130) ou de travail à puissance maximale
aérobie.
Il est temps que les préparateurs physiques des sports collectifs réalisent que
la course continue lente ne sert à rien pour améliorer l'endurance : il faut
donc supprimer de l'entraînement tout footing lent.
Si l’on étudie la méthodologie utilisée par les préparateurs physiques, nous
constatons que le travail visant à améliorer l’effort explosif qui caractérise
les actions du basketteur se positionne la plupart du temps à la fin du
programme de préparation physique. On arrive alors à la contradiction suivante :
pour préparer des efforts explosif brefs de très grande qualité, on utilise des
exercices lents en grosse quantité. On oublie que musculairement ces deux
efforts n’ont rien à voir. On peut même ajouter que dans un cas on développe les
fibres lentes (endurance) et que dans l'autre on a surtout besoin des
fibres rapides (explosivité). A trop pratiquer la course lente, on va à
l'encontre du but recherché : améliorer l'efficacité du basketteur.
Le
paramètre Qualité
La musculation a toujours été dépendante de l’endurance, placée dans une
programmation construite sur la logique de l’énergie. En fait, nous pensons
qu’il faut renverser complètement le raisonnement. La préparation physique doit
permettre d’améliorer l’efficacité de chacune des actions : sauter plus haut,
démarrer plus vite. C’est la musculation qui permet de développer cette
explosivité.
Il faut donc avant tout chercher à augmenter la détente et la vitesse d'une
seule action, ce qui n'est pas facile à obtenir. En cherchant à développer cet
aspect primordial de la préparation physique, on rentre dans le domaine de la
qualité. Pour améliorer le paramètre explosivité, il faut passer par plusieurs
étapes successives : les sprints, puis les bondissements horizontaux (cerceaux,
cordes, etc.) puis les bondissements verticaux (haies, bancs, plinthes...) et
enfin les charges lourdes.
Le
paramètre Quantité
Il serait erroné de penser que toute la préparation physique du basket
s'arrête à ce que l’on a énoncé ci-dessus. Il faut être capable de répéter ces
actions dans le match et résister à la fatigue. Dans ce cas, on rentre dans le
domaine de la quantité. En basket les efforts se répètent, il faut donc
préparer les joueurs de manière à ce que leurs prestations (sprints, sauts...)
perdent le minimum d'efficacité au cours du match.
Deux solutions se présentent : l’attitude moyennante et l'attitude par
contraste.
L'attitude
moyennante
Le raisonnement est simple : Si la durée totale des efforts est de 20 mn
par exemple, on propose une course continue à allure moyenne de 20 mn et plus,
de manière à être endurant sur le temps de la compétition (on fait une moyenne
entre efforts et repos).
On nivelle donc les efforts par le bas et on retrouve l'endurance continue avec
la notion de volume qui précède le travail qualitatif. Si l’on est fanatique ,
on peut même dans ce cas proposer de l’endurance fondamentale pour préparer le
travail d’endurance continue.
L'attitude
contrastée
Il nous paraît plus intéressant au contraire d’exagérer les différences et de
respecter la haute qualité des efforts. Il faut donc chercher des situations
intenses alternées avec des pauses relatives ou complètes. Parmi les différentes
façons d’aborder l’endurance, l’intermittent nous semble particulièrement adapté
pour mettre en œuvre ce principe. D’un point de vue physiologique, il a été
démontré par G. Gacon que la fréquence cardiaque monte pendant l’effort et n’a
pas le temps de redescendre pendant le repos, elle se stabilise donc en
plateau : il s’agit donc bien d’un effort d’endurance. De plus, localement les
muscles se reposent pendant le repos actif ce qui favorise la sollicitation des
fibres rapides lors de l’effort suivant et une meilleure qualité de travail.
On peut dire que l’intermittent travaille l’endurance et la qualité musculaire.
Les formes d’intermittent les plus répandues sont le 5-15, le 15-15, le 30-30 et
le 10-20 secondes (rapport durée effort / durée repos). La musculation quant à
elle, est utilisée pour durcir le travail en qualité.
Figure 5 : Les paramètres Qualité et Quantité dans la préparation physique en basket-ball
La
Qualité avant la Quantité
La qualité d’exécution est prioritaire sur la quantité. Il ne sert à
rien de répéter de nombreuses fois un geste faux : courir de nombreuses fois (ou
longtemps) sur un placement défectueux ou avec des contractions musculaires de
mauvaise qualité ou sauter 100 fois n'importe comment, tout cela ne sert à rien.
Il faut d'abord corriger le placement (par la musculation) et améliorer la
qualité de la réponse musculaire que nécessite la vitesse. Une fois ces bases
maîtrisées, on peut alors se permettre d’envisager les paramètres aérobies
(travail intermittent). En résumé, on s’intéresse d’abord à la qualité
musculaire avant de passer à la répétition.
Quelle
est la véritable problématique de la préparation physique ?
Ce qui frappe en premier lieu, c'est la débauche d'énergie inutile imposée aux
jeunes joueurs. Ceci se traduit même dans le langage : " on fait du physique "
au lieu de " on travaille les qualités physiques ", la qualité est passée à la
trappe, c'est vraiment l'impression que l’on a de l'extérieur. La pratique du
basket par ses exigences techniques et tactiques impose un rythme de travail et
une dépense d'énergie déjà très importants, aussi, quand on décide de faire du
" physique ", il faut vraiment que le jeu en vaille la chandelle.
Il convient donc de se poser les questions suivantes avant de commencer :
-Le niveau technique des joueurs est-il suffisant pour prendre du temps sur le
basket et aborder le physique ?
-Il est inutile de faire courir quelqu'un plus vite s'il doit se croiser les
mains lors d'une réception ou marcher sur un démarrage.
-Quelles qualités développent naturellement la charge de travail imposée par
l'entraînement du basket ?
-Les entraînements intenses (techniques et tactiques) sollicitent principalement
la filière aérobie. La fatigue quand elle survient oblige l'intervention des
fibres lentes.
-Quelles sont les qualités qui font la différence au basket dans les duels et
les actions décisives ?
-Vitesse, réactivité, explosivité, tels sont les termes fréquemment employés. On
pourrait résumer cela par une donnée physiologique simple : la mise en jeu
efficace des fibres rapides.
-Qu'est-ce qui est le plus facile (et le plus difficile) à améliorer ?
-L'aptitude à courir plus vite sur un 10 m ou la possibilité de tenir 100 fois
10 m ? La vitesse ou l'endurance ?
Ici il faut tout de suite donner la réponse de la physiologie il est extrêmement
difficile d'améliorer la vitesse alors qu'il sera toujours possible de faire
progresser l'aptitude à répéter les efforts. En clair, transformer des fibres
rapides en fibres lentes n’est pas un problème, par contre, faire passer les
fibres lentes (ou intermédiaires) en fibres rapides constitue le défit premier
que le préparateur physique doit relever.
En
résumé :
Pour les joueurs qui n’ont pas un bon niveau de basket, il vaut mieux ne
faire que du basket.
Le basket a tendance à faire travailler naturellement la filière aérobie; faire
du physique suppose donc que l’on s‘attaque à ce qui n’est pas travaillé
spontanément : la vitesse.
La vitesse ne s'améliore que si on met toutes les chances de son côté, à
savoir : un travail de grande qualité (intense et sans fatigue), une
sollicitation des fibres rapides (le meilleur moyen est la musculation avec
charges très lourdes ou la pliométrie bien faite), une concentration nerveuse
maximale et des récupérations longues, et une priorité à cette qualité à chaque
début de séance physique.
Les qualités aérobies doivent toujours venir après. Ce sont les seules qualités
qui tolèrent, mieux qui exigent la fatigue.
Fibres
lentes ou fibres rapides, il faut choisir !
Tout le monde tombe facilement d'accord sur les 2 paramètres importants de la
préparation physique en basket : vitesse-détente et puissance maximale aérobie
(PMA). On construit donc une programmation articulée sur ces 2 axes et, dans le
meilleur des cas, on consacre un temps égal aux 2 aspects (souvent
malheureusement on passe plus de temps sur la PMA). On croit alors être efficace
sur le paramètre vitesse-détente, c'est là que l'on se trompe lourdement. La
vitesse et la détente ne sont pas améliorées dans un tel contexte.
Quelles sont les formes de travail permettant la sollicitation des fibres
rapides ?
-certaines séquences "basket" de début de séance avec concentration maximum et
de courte durée ;
-le travail de vitesse (très peu pratiqué) ;
Le travail de musculation avec charges très lourdes (90%) et mouvements généraux
comme le squat (pratiquement pas effectué dans ces conditions).
Le reste du travail tire dans le sens du lent :
-l'entraînement classique de basket : dès que la fatigue intervient dans une
séance, on bascule de la vitesse vers l'aérobie et on "émousse" la vitesse ;
-tout le travail aérobie même intermittent ;
-les "délires physiques" du type "suicide".
On retrouve un déséquilibre énorme en faveur du lent et on s'étonne après cela
que les athlètes soient lents !
La " conception " aérobie nuit à l’explosivité et la vitesse absolue du joueur
s’en trouve diminuée. Cependant, si l’on parvient à améliorer la vitesse sur
10 ou 20 mètres, le joueur de basket-ball sera plus efficace sur l’ensemble du
match, le bénéfice se fera sur 40 minutes, mais la perte en fin de match sera
toujours présente. Il faudra donc alors travailler à puissance maximale aérobie
avec le procédé le plus qualitatif qui prend en compte une grande qualité dans
le travail : le travail intermittent. A ce stade, on semble être arrivé dans une
impasse, puisque les deux types de travail, complémentaires dans la recherche de
l’amélioration des performances du basketteur, semblent avoir des effets
antagonistes, puisque l’un sollicite les fibres lentes et l’autre les fibres
rapides.
De nombreuses études ont porté sur des entraînements d'endurance et de
vitesse-force. Aucune étude ne montre un gain de force ou de vitesse grâce à un
travail aérobie. Par contre de nombreuses études mentionnent une influence
d'entraînement de type force avec charges lourdes sur l'efficacité d'effort de
type aérobie, et ceci sans amélioration du V02 max. Les auteurs en concluent que
l'amélioration est due aux caractéristiques neuromusculaires, à une meilleure
économie de course, et à l'élasticité.
En conclusion, nous pouvons affirmer que seul un entraînement de vitesse-force
pourra améliorer les performances aérobies, jamais un entraînement aérobie ne
pourra faire progresser la vitesse d’un basketteur sur 10 m ou 20 m.
Conclusion
L'individu, surtout quand il est jeune, mérite le respect. Aussi, avant
de lui imposer une dépense d'énergie, il faut s'interroger sur l'intérêt de
l'effort. La philosophie "plus j'en bave (pour rester poli) mieux je me porte"
est archaïque, il semble qu'elle ait encore cours en sports collectifs et le
basket arrive en premier.
L'entraîneur de basket doit être conscient que pour parvenir à ses objectifs
"basket", il est obligé de demander déjà beaucoup d'efforts à ses joueurs et
cela est normal. Dans ce cas, ce dernier doit savoir que ces efforts seront
effectués au détriment de la forme physique du samedi ou du dimanche. En effet,
l’entraîneur peut estimer que des situations tactiques justifient une fatigue
plus grande dans la semaine et faire le pari que le manque de fraîcheur physique
sera compensé par une tactique plus efficace, mais il doit le faire en
connaissance de cause.
Alors que peut-il se permettre en plus? Peu de choses et donc du qualitatif. Il
doit évaluer la charge de travail qu'il impose par le basket (l'entraînement
spécifique) qui est essentiellement du registre aérobie, et compléter en
priorité par un travail de vitesse et de détente dans lequel la musculation doit
prendre place (mais attention avec grande intensité et donc grande compétence de
l'entraîneur). Le travail de vitesse est le plus simple, mais attention, il ne
s'agit pas que de se démener comme des fous; aujourd'hui on distingue trois
types de séances en vitesse :
-Le travail d'appuis et bondissement type "skipping".
-Le travail de "démarrage" sur moins de 10 m.
-Le travail de fréquence (appelé "méthode Donati").
En puisant prioritairement dans ces registres, on peut faire des choses
intéressantes sans matériel sophistiqué.